Comme deuxième proposition face à cette nouvelle série d’articles, je me devais d’y aller avec Exodus. C’est l’un des groupes qui a su donner au thrash metal ses lettres de noblesse en y ajoutant une certaine virtuosité. On s’entend que le Big 4 devrait s’étendre à Big 5 car il se veut insouciant de ne pas inclure Exodus dans cette appellation qui souligne l’effet indélébile des formations que sont Metallica, Megadeth, Anthrax et Slayer dans l’émancipation du genre thrash metal. Mais quand on regarde (et surtout écoute) attentivement Bonded By Blood, cet album demeure une œuvre thrash métallique indéniable.

Bonded by Blood est sorti en 1985. Certains ne le savent peut-être pas mais Exodus demeure le premier groupe de Kirk Hammett de Metallica. Il n’a jamais enregistré d’album avec Exodus et cette formation de thrash metal reste le « bébé » de Gary Holt, guitariste extraordinaire qui a joué aussi lors des derniers balbutiements de Slayer.

La version que je possède est celle de Banzaï Records, au numéro de série BRC 1939, avec l’étiquette noire (confirmant que ceci est le second pressage de l’album, selon la légende) sur le côté A ou le THIS SIDE.

Enfant des années ’80 et amateur de metal assez tôt, nos expériences étaient comme un sac à surprises. Les achats d’albums se faisaient selon certaines techniques. Dans un premier temps, il y avait le bouche-à-oreille. On avait entendu parler de ce groupe, on avait entendu l’album de ce groupe chez quelqu’un ou en se rendant au magasin, tu avais tout le temps un chummy qui te disait : « Achète ça, ça doit être bon! » ou « Achète celui-là, ça d’l’air bon! »

Aussi, ceux qui avaient le câble pouvaient avoir vu le clip sur l’émission metal de Much Music du nom de Power Hour et par la suite, lorsque Musique Plus s’est retrouvée en ondes, il y avait SolidRok. Par contre, ce ne sont pas tous les groupes qui tournaient des clips, exercice plutôt onéreux à l’époque.

Et il y avait le classique d’acheter un album, juste parce que la couverture se voulait choquante, affreusement belle ou horrifique. Pour ce qui est de Bonded By Blood, avec les jumeaux siamois sur sa couverture, c’était indéniable. Je me devais d’avoir cet album, ne serait-ce que pour son effet traumatisant!

À Chicoutimi, il y avait quelques disquaires où nous pouvions faire nos achats en albums métalliques. Tant qu’à se rendre au centre d’achats avec la famille, nous devions aller chez Disques et Rubans A&A. C’était moins compliqué car à Place du Royaume, on trouvait de tout. Après une visite chez Woolco, on pouvait arrêter chez A&A et dire aux parents : « Je veux juste aller voir les disques! » après avoir regardé toutes les figurines GIJoe et de Star Wars, juste avant.

Mes parents ne s’obstinaient jamais, étant grands fans de musique eux-aussi. Quand j’ai vu le Bonded by Blood dans le rack, la couverture me parlait. En flippant le vinyle, je pouvais voir les musiciens du groupe en action, sur scène. Ils avaient tous des regards affolés, ce qui me donnait un signe que ceci devait être du metal intense. Il fallait se fier à tous les indices, tous!

Mais l’élément majeur était le logo Banzaï, en bas à droite. Ceci était un gage de qualité!

Je devais avoir reçu un 20$ pour un bulletin scolaire plus que satisfaisant car j’en ai fait l’acquisition, lors de cet été de 1985. « J’peux-tu prendre celui-là? » de demander à ma mère. Et elle de répondre : « C’est pas bin bin beau comme pochette… C’est ton argent, fais donc ce que tu veux avec! » C’était bien souvent la façon de faire, dans ce temps-là.

En septembre 2016, lors de la visite de Slayer au Metropolis, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec le batteur Paul Bostaph et le guitariste Gary Holt. Comme de raison, nous avons parlé de Slayer et de Repentless, l’album qui se voulait en promotion mais j’ai aussi sauté sur l’occasion pour jaser de Forbidden avec Bostaph et d’Exodus avec Holt.

En entrant dans l’autobus de tournée, nous laissions derrière nous cette légère fraicheur de septembre. J’étais avec Mihaela Petrescu qui prenait des photos pendant que je posais mes questions. Il était rare d’avoir une entrevue avec une formation comme Slayer et vous me direz que ce ne sont pas des membres originaux et je vous l’accorde.

Sauf que d’avoir deux musiciens aussi légendaires que Holt et Bostaph, je ne pouvais que jubiler. D’en avoir un seul, j’aurais été choyé donc d’y aller avec un doublé, il ne fallait pas que je manque ma shot. Selon le courriel qui me confirmait l’entretien, j’avais droit à 15 minutes. Professionnel que je suis, je demande toujours, lorsqu’ils nous restent environ 2 minutes ceci, à la personne avec qui je fais l’entrevue : « Combien de temps nous reste-t-il? » 

Holt m’a alors dit : « Tu peux prendre tout le temps qu’il te faut! »   

Donc, n’aimant pas l’exagération, je me suis dit qu’avec un bloc de 10 minutes additionnel, je serais en business. Je savais que j’allais manquer la prestation de Death Angel (qui ouvrait le concert avec Anthrax au milieu) au complet mais une occasion de la sorte, cela arrive aussi souvent qu’une participation des Canadiens en série éliminatoire.

Comme je le disais précédemment, j’ai posé la question à Holt au sujet de la réputation de Banzaï.

Et j’ai eu la même réponse : « Tu sais, dans ce temps-là, tout le monde nous volait! »  

J’ai eu le temps de jaser avec Bostaph du fait que Slayer avait sorti God Hates Us All lors de la journée du 11 septembre et même de l’après Slayer, alors que Tom Araya parlait déjà de retraite!

Après cette discussion, j’ai fait signer mon album de Repentless par les deux protagonistes mais surtout, ma copie de Bonded By Blood. Après les remerciements d’usage, Mihaela et moi sommes sortis de l’autobus, plutôt fiers de ce moment exquis. Il ne nous restait plus qu’à s’immiscer à l’intérieur du Metropolis, après avoir reçu nos autorisations et moi, protégeant ma copie de Bonded By Blood, bien insérée dans une boîte de carton pour éviter d’être abimée par un mouvement de foule.

Sur place, je me suis rendu compte que Death Angel était encore sur scène, le temps de quelques lignes. Je n’avais pas tout perdu après tout et c’est encore plus étonnant de voir que Mark Osegueda est maintenant le chanteur du groupe de Kerry King.

Ce qui nous confirme que, toute est dans toute…