Ce matin, je suis tout sourire malgré le manque de sommeil évident. De retour à la maison aux alentours de minuit et quelques minutes, je suis debout depuis 4h30, en relation avec le chat qui demandait la porte, voulant aller dehors. Café près du clavier, je tape les mots en me disant qu’il aura fallu attendre deux ans avant d’avoir accès à cette tournée de Sepultura.
Deux années, c’est long mais quand j’y repense, le tout a passé très rapidement. D’avoir ce premier concert de type international a définitivement mis en marche ce retour tant attendu des tournées, des concerts majeurs et des sorties de semaine pour aller hocher de la tête devant des groupes que nous chérissons.
Deux ans, je me rends compte que la foule a changé. Les vieux de la vieille se tiennent encore plus loin du plancher, les cranes se veulent encore plus dégarnis, les bédaines ont pris de l’expansion mais un vent de fraicheur était palpable hier.
De jeunes métalleux, début vingtaine, qui ont meublé l’espace devant la scène. Des gars et des filles que je n’avais jamais vus. Oui, un renouvèlement de la foule. Espoir métalloïde, il y a. J’ai vécu un beau moment en voyant cette fougue, de jeunes gens qui s’entrechoquaient sur des chansons qui ont été enregistrées alors que leurs propres parents devaient être adolescents.
Une épiphanie? Presque, quand on y pense! Une certaine fierté à voir cette relève. Cela fait du bien, surtout quand tu sais que ta propre progéniture se dirige vers les contrées métallifères, cela fait un immense bien au cœur du monsieur que je suis.
Guichet fermé pour cette soirée, je me suis enligné dans le Corona sur les dernières mesures de la formation Art of Shock. Regard sur la table de merch de Sepultura, les t-shirts ne me semblent pas incroyables, aucun vinyle. Je me dirige vers celle de Sacred Reich, aménagée au bar et je me rends compte que des produits de Sir John et de Messorem sont disponibles. Des restants du Brewtal Montréal de décembre? Probable…
Phil Rind, chanteur et bassiste chez Sacred Reich, n’a pas le type de visage qui le rend antipathique. Non, il a plutôt cet air joufflu de ton mononcle préféré, celui qui t’offre toujours le cadeau le plus cool à ton anniversaire. Hier soir, il était tout sourire. Tu sentais, lors de la mise en place de la scène, qu’il avait vraiment le goût d’être là.
La bannière de Sacred Reich était hissée bien haute, laissant le logo orner le fond de la scène. Divide & Conquer a été présentée pour ouvrir cette prestation, une performance qui se voulait une première en deux ans pour de nombreux amateurs arrivés sur le tard, eux-aussi. Personnellement, le dernier album du groupe Awakening ne s’est pas retrouvé dans mon Top 100 en 2019 donc d’entendre The American Way tout de suite après cette pièce tirée de cet album est venue me confirmer que le groupe allait alterner car, même en mode promotion face à cette galette, elle demeure lointaine.
Par contre Manifest Reality est apparue ensuite, nous laissant entrevoir un Dave McClain puissant aux percussions. Independent et Who’s to Blame sont venues satisfaire le cœur des amateurs de la vieille école, Rind demandant qui, parmi la foule, étaient des gens âgés de plus de 40 ans. De nombreuses, très nombreuses mains, se sont levées.
La pièce titre du dernier album a été jouée et c’est à ce moment même que je me suis rendu compte que les gens dans le pit se voulaient, infatigables. Avec Ignorance, nous avons compris que la cadence ne prenait pas de repos et le nouveau guitariste du groupe, Joey Radziwill, nous a prouvé que même s’il n’était pas né lorsque l’album a été lancé, il était capable de l’enligner solidement sur la six cordes.
Après Salvation, j’ai eu mon moment personnel old school avec Death Squad et Surf Nicaragua, deux chansons du répertoire thrash des années ’80 qui ont accompagné mon adolescence et mes O’Keeffe tablettes.
Satisfaction atteinte, je me suis gardé des réserves d’énergie pour Sepultura, accompagné par un bon produit de Sir John qui restait dans les fridges du Corona.
Non, ne me sortez pas l’argument que le Sepultura moderne n’est pas le vrai Sepultura. Cet argument ne tient plus, malgré une certaine véracité, surtout que Derrick Green est avec le groupe depuis 24 ans…
L’enivrement lié au fait d’assister à un premier concert « comme avant » se voulait fort, très fort même et de savoir que j’allais goûter à quelques gros canons de la part de Sepultura me plaisait amplement. Et je dois avouer que j’aime bien la période Green depuis les quatre derniers albums, excluant le SepulQuarta, étant donné qu’il ne faut pas le considérer comme un album en tant que tel.
Les 4 musiciens, sur une scène plutôt épurée, sont entrés sur scène sur la pièce Policia, du groupe Titas. Green porte encore une botte de contention, en relation avec une blessure qui ne l’empêche pas de performer sur scène. De mon point de vue, derrière la console de son, je n’ai que le focus sur les amplis Orange d’Andreas Kisser. C’est à ce moment que je me demande si cela est nouveau ou si c’est moi qui perds la mémoire avec tout ce confinement et autres périodes d’incertitude.
Isolation est la chanson qui a démarré la soirée pour Sepultura. L’engouement pour cette chanson était perceptible dans la foule mais ce n’était rien de comparable avec la suivante, Territory. Éclairage adéquat, sonorité qui se voulait puissante, il était magistral de se sentir sur place après toute cette période à regarder des concerts sur notre écran d’ordinateur.
Capital Enslavement, Means to an End et Last Time, trois chansons de Quadra, ont suivi. Elles ont gardé le moral des troupes bien éveillé mais d’avoir Kairos et Propaganda, de l’album Chaos AD, a vraiment été bénéfique. Andreas Kisser s’en tire bien en étant seul à la guitare mais il serait bien intéressant d’avoir une seconde guitare, question d’avoir un ensemble encore plus englobant.
L’instrumentale The Pentagram a permis à Green d’aller faire une pause en arrière-scène et la surprise de la soirée est venue avec Infected Voice, qui se veut la chanson qui ferme l’album Arise. La chanson Agony of Defeat a ralenti le tempo considérablement mais le tout a été repris habillement par le groupe avec le doublé Refuse/Resist et Arise, pour que le groupe puisse quitter le temps de quelques secondes, pour mieux revenir avec un combo plutôt évident de Ratamahatta et Roots Bloody Roots.
Satisfaction totale, pour tous. Retour de la métallicité à Montréal en mode international, la porte est maintenant grande ouverte et le tout a été possible, grâce à Sepultura.
Photos : Susan Moss/Evenko (Montréal, le 17 mars 2022)