Je te commence ça en vieux bonhomme mais le mois de septembre est doux en cibole! Après la swompe laissée par le mois d’août, surtout dans certains sous-sols dont le mien, il faut se rendre à l’évidence que septembre est chaleureux. Par contre, j’ai hâte que l’automne s’installe pour pouvoir recouvrir mon gaminet d’une veste de jeans, manger de la fondue avec une seule fourchette pour faire durer le plaisir et faire des feux dans ma cour les dimanches après-midi. Mais il faudra attendre encore selon Meteomedia et surtout, selon Opeth, qui ont repoussé la sortie de leur nouvel album au mois de novembre plutôt qu’octobre. Si ce ne sont pas des signes…
Ce qui fait que jeudi après le travail, je me suis enligné au centre-ville de Montréal, direction rue St-Denis dans l’espoir de pouvoir m’attabler à la terrasse du St-Bock, le temps de me siffler deux ou trois pintes avant d’aller voir Goatwhore au Piranha Bar. J’étais sur place vers 16h30 et le serveur m’indique qu’il y a une table pour deux de disponible, sur la terrasse. Je m’y assois et je m’accoude sur le retour de la gouttière, question d’avoir un confort au niveau du bras.
À la table près de la mienne, quelques étudiants du CEGEP du Vieux-Montréal partagent un pichet et à entendre leur discussion, ils ne semblent pas apprécier leur session. Ils parlent fort tout en se donnant des accents français lors des grandes montées haineuses mais retombent dans un français d’ici lorsque la discussion reprend une ligne plutôt apaisante. Par contre, l’accent français reprend au moment où le serveur, aux origines françaises indéniables, demande s’ils vont prendre autre chose.
Ils quittent et une autre tablée s’installe. Ce sont des jeunes hommes et jeunes femmes qui arborent des t-shirts noirs aux couleurs de Signs of the Swarm, Thy Art is Murder, Whitechapel, Lorna Shore et Bring Me the Horizon qui s’installent à cette table, regardant le menu bière. Ils se commandent des pintes et un des gars du groupe, voyant que je porte un t-shirt métallique, me demande sur je vais au show ce soir. Je confirme que j’y serai et que ça fait quelques années que le groupe n’est pas venu à Montréal. Le gars me répond : « Non, quelques mois, pas quelques années! »
Là, je me rends compte que nous ne parlons pas de la même chose. C’est à ce moment que je comprends qu’il doit y avoir un autre concert en ville, étant donné que l’offre est plutôt intense depuis quelques semaines. Effectivement, le jeune homme me confirme qu’ils vont voir Lorna Shore qui est au MTelus. Les Rois du deathcore sont en ville mais de mon côté, je vais voir les Rois du Bayou, section black-death bien thrashé!
En allant aux toilettes, je me rends compte qu’effectivement, il y a de nombreux t-shirts un peu partout aux couleurs de Lorna Shore. Après ma pissette, c’était le temps de me diriger vers le ténébreux Piranha, rejoindre mes semblables pour une soirée aux sonorités plus salaudes.
Devant le complexe Piranha-ien, je vois bien que les grandes bâches qui recouvraient la portion du sous-sol n’y sont plus. Probablement en mode réfection lors du concert de Necrot, maintenant nous voyons clairement ce large espace bétonné qui sert aussi de lieu d’échauffement pour les groupes et de rangement pour les formations musicales en ouverture. Montréal étant une ville où les groupes se font amplement voler leur équipement, il est fort à parier que cette pratique risque de prendre le bord!
Après avoir décliné mon identité à la porte, j’entends Shroud qui débute sur la scène. Il y a déjà une bonne dizaine de personnes qui sont présentes dans le bar mais c’est l’odeur de fosse septique qui frappe amplement mes narines. J’imagine que les musiciens des trois groupes en tournée ont utilisé les latrines pour se vider les boyaux, remplis de Taco Bell.
Ayant déjà changé des quantités astronomiques de couches et étant quelqu’un qui a déjà fait du camping, ce n’est pas ce genre d’odeur nauséabonde qui peut m’empêcher d’apprécier un concert, surtout que le son de Shroud m’interpelle immédiatement. Avec une attaque thrashée juste assez bien noircie, le groupe a amplement meublé ses 30 minutes avec des pièces bien baraquées, interprétées par des musiciens dont le mot d’ordre est le suivant : porte ta battle vest sur le stage!
Bien installé devant la scène, j’en ai profité pour effectuer un rituel que j’apprécie : regarder le bassiste jouer. Étant quelqu’un qui a déjà joué de la basse mais qui a bifurqué vers le chant, j’apprécie lorsque l’ambiance d’un show me permet de m’attarder à la performance du bassiste. Jeudi soir, j’ai regardé Justin Cournoyer se faire aller le pick sur sa basse de type Flying V. Le gars était précis et ce qui me blaste le plus c’est de voir comment le tout semble facile, moi qui ai toujours rushé pour pratiquer correctement de cet instrument. De voir un type comme Cournoyer en jouer, dodelinant de la tête sans échapper ses lunettes, cela me confirme que certains sont nés pour en jouer, mais d’autres pour en parler…
Après Shroud, je me suis permis de monter les escaliers pour me rendre à la section du Piranha au rez-de-chaussée. À cet endroit, le choix de bières se veut plus vaste et je me suis procuré une NEIPA de St-Ambroise. De retour dans l’antre, les membres de Necrofier étaient en train de s’installer. Les Texans s’affairaient à monter un pied de micro avec un crâne de bouc, laissant paraitre leur allégeance au Grand Malin. Bottes de cowboys aux pieds, le groupe nous a offert un black metal plutôt mélodieux, parsemé de shots de boucane, question de rendre le tout encore plus mystérieux et glauque.
Vers le milieu de leur prestation, la foule (qui prenait un peu plus de volume au fur et à mesure que la soirée avançait) s’est mise à bouger et quelques participants se sont entrechoqués, ce qui a semblé déstabiliser le gars en perfecto, portant un corpsepaint excessivement réussi, qui était pratiquement en communion devant Necrofier. Formation solide, il était tout de même intéressant de voir le batteur Dobber Beverly et le guitariste Semir Özerkan y aller dans les arts métalliques plus noircis, sachant qu’ils jouent aussi avec la formation de rock progressif, Oceans of Slumber.
Vitriol ne l’a pas eu facile lors des dernières semaines avec la perte de leur guitariste Daniel Martinez mais surtout avec le départ du bassiste, Adam Roethlisberger. Ce membre original de Vitriol a décidé de quitter le bateau, en plein milieu de cette tournée. Dorénavant, Vitriol agit en tant que duo et jeudi soir, ça n’a pas été facile pour eux. Alors que le groupe débutait son tour sur scène, le guitariste et chanteur Kyle Rasmussen est sorti de scène pour aller régler un pépin de guitare, tout en continuant de jouer. Il fouillait dans son sac à dos tout en tentant de taper des notes sur le manche, ce qui ne fonctionnait aucunement. Les percussions ont continué, le batteur s’est retourné pour constater ce qui se passait et le tempo ralentissait, tandis que la piste sonore de basse continuait de rouler en arrière-plan.
Tout s’est arrêté. Silence… La foule s’est mise à chanter « One more song! » en guise de blagounette, ce qui a permis d’apaiser les esprits. Rasmussen a alors lancé : « Je crois que la foule vient de comprendre que notre bassiste n’est pas avec nous sur scène! » et le duo a repris là où il avait laissé. Cet incident a laissé un certain froid dans la salle. Certains se sont décidés d’embarquer mais en général, on sentait une perte d’intérêt plutôt global. Comme on dit dans le monde du hockey, le groupe n’a pas été mesure de reprendre le momentum et ce, malgré la bonne volonté des deux membres de Vitriol.
C’est vers 22h10 que Goatwhore est monté sur scène, le temps de venir nous sacrer une bonne volée, bien méritée, après 6 ans d’absence dans la métropole. Passant derrière le mur d’amplificateurs, les musiciens avaient la même tronche que la dernière fois : habillés en noir et le chanteur Ben Falgoust arborait son fidèle bracelet de studs.
De réputation, Goatwhore est reconnu comme étant l’un des bands les plus précis et efficaces sur scène et ce, depuis quelques décennies. En y allant avec The Bestowal of Abomination, qui provient du dernier album de la ChèvrePute, la tapoche était plutôt intense. Ça bougeait derrière moi, la satisfaction était visible parmi les participants autant que sur les visages de Sammy Duet, Ben Falgoust et du bassiste Trans Am. Pour ce qui est du sentiment d’approbation du batteur Zack Simmons, il est difficile pour moi de confirmer car j’avais trop de buée dans mes lunettes.
Après nous avoir garoché avec intensité Alchemy of the Black Sun Cult et Death from Above, le guitariste Sammy Duet a demandé : « Comment ça va Montréal? » La réponse donnée par la foule lui a amené le doute au visage, se demandant s’il n’était pas au Mississipi, ville reconnue comme n’étant pas des plus participatives. Mais la foule a repris de plus belle, y allant avec enthousiasme et Duet, sourire en coin, semblait satisfait.
Pendant Under the Flesh, Into the Soul, c’est à ce moment que Falgoust s’est mis à distribuer les fists bumps et à y aller profondément au niveau de l’intensité capillaire, les cheveux virevoltant à tout rompre. On s’entend qu’à 51 ans, cet homme doit avoir un excellent chiro! Malgré la petitesse de la scène, il était intéressant de voir les changements de position de Duet et de Trans Am, permettant à tout le monde de voir les prouesses de chacun. Par contre, c’est la performance scénique de Falgoust qui demeure le point majeur des prestations de Goatwhore.
Ensuite, Born of Satan’s Flesh nous a permis d’apprécier la voix d’accompagnement de Duet qui se veut d’un ajout punitif et c’est vraiment avec Apocalyptic Havoc qui la foule a perdu tous ses moyens. Pièce majeure dans le catalogue du groupe, elle se veut le moment le plus attendu où chacun peut hurler « Who needs a God when you’ve got Satan! » Après cette pièce, tu te demandes si la foule aura encore du gaz dans la tank et c’est effectivement ce qui est arrivé avec Carving Out The Eyes of God, And I Was Delivered From the Wound of Perdition et FBS.
J’ai quitté le Piranha pendant la dernière pièce, je commençais à ressentir le poids de mon réveil à 4h40 du matin. Dans le métro, je me suis mis à jaser avec deux gars qui revenaient du concert de Lorna Shore. Ils m’ont demandé si j’y étais aussi. J’ai répondu que je revenais plutôt du concert de Goatwhore. Ne connaissant pas le groupe, j’ai expliqué aux des copains improvisés comment ce groupe sonnait, agissait ainsi que des groupes en ouverture.
C’est alors que l’un des gars m’a dit : « Ouais, comparativement à nous, j’ai comme l’impression qu’on arrive d’un show de musique pop! »
Ce n’est pas moi qui l’ai dit!
Photos : Mon téléphone