Vingt-trois ans d’attente. La dernière visite de Borknagar remontait à juillet 1999 alors que le groupe se retrouvait pour un genre de MetalFest montréalais de BCI qui se voulait une branche ajoutée au Milwaukee Metalfest alors que le groupe accompagnait Neuraxis, Divine Empire, Witchery, Peccatum et Emperor pour compléter une affiche hallucinante pour l’époque.
Quand je regardais les gens dans la foule hier, certains et certaines n’étaient même pas nés lors de ce concert, tandis que d’autres devaient être encore à la garderie et étaient fort probablement de grands fans de Macaroni Tout Garni.
Deux ans est le temps d’attente face à cet arrêt de la tournée Devastation on the Nation qui a dû se mettre, elle aussi, au neutre après la mise sur pause de tout ce qui bougeait, en 2020. Maintenant que tout est revenu à la normale, il était temps d’aller se compacter dans les Foufs pour le Devastation on the Nation, avec son horaire explosif.
6 heures est le temps que nous avons dû nous grignoter les ongles jusqu’aux jointures car nous avons appris que Rotting Christ et Borknagar n’avaient pas passé les douanes pour leur arrivée au Canada. Après avoir compris que tout était en relation avec de la paperasse, tout l’espoir était permis et c’est après quelques heures que le Devastation on the Nation nous a assuré de la présence des deux formations européennes pour Montréal et Québec.
Débiter le dépité
En allant prendre le métro, je me suis rendu compte que le clavier de la distributrice de billets de métro m’indiquait que mon NIP était erroné. J’ai donc changé de stratégie et me suis retrouvé au comptoir où j’ai revécu la même expérience. Est-ce que j’étais victime d’un clonage de carte et on me vidait mon compte? Je devais en avoir le cœur net.
En effectuant un appel à ma banque, qui s’est avéré plus long que prévu, je me suis donc retrouvé aux Foufs pour voir et entendre Abigail Williams. J’avais donc manqué les trois premiers groupes que sont Stormruler, Vale of Pnath et Ghost Bath mais malgré ma mésaventure, j’estime que j’aurais tout même manqué les deux premiers groupes, étant donné que cette soirée débutait assez tôt.
Même sur place, je n’avais en tête que ma carte de guichet. Est-ce qu’on était en train de liquider mon avoir? Est-ce que mon identité avait été volée? C’était d’une lourdeur cérébrale.
Au moins, lorsque j’ai pris le temps de bien saisir qui était sur scène, j’ai pu m’abandonner un brin. Le black metal atmosphérique des Américains d’Abigail Williams a réussi à m’englober amplement. Leur son n’a plus rien à voir avec leur amalgame sonore de Bodom Dahlia Murder. Maintenant, Ken Sorceron est retourné aux sources du mal et il est le maitre d’œuvre de cette sonorité englobante mais qui demeure tout de même acidulée.
Balance de son adéquate, ce qui portait ombrage à celle vécue lors du concert d’Hypocrisy de dimanche, je me suis royalement laisser aller après la deuxième chanson, laissant au loin mes pensées face à la possibilité qu’un Srilankais se face passer désormais pour moi.
Portant le capuchon, chaque membre du groupe avait cette allure de sorcier druide œuvrant pour le malin. En maximisant sur le matériel de leur dernier album Walk Beyond the Dark, il est évident que l’effet surprise a été réussi et quelques personnes sont probablement en train de se taper la discographie du groupe, en ce moment, sur Spotify en confirmant la cassure de son aux alentours de 2010 avec In the Absence of Light.
Gens du Nord
Après avoir eu l’opportunité de jaser avec de bonnes vieilles copines et faire une mise à jour face à un projet avec Matt de Cryptopsy, il était maintenant temps de reprendre ma place aux alentours de la console de son pour assister au retour de Borknagar. Il demeurait essentiel que je ne sois pas en retard pour la première mesure. J’avais réussi à me chasser de la tête le fait qu’il y avait probablement un pirate informatique congolais en train de vider mes REERs, en ce moment même.
Avec la bande sonore en introduction, nous avons senti une coupure de celle-ci pour qu’elle reprenne, comme un peu plus loin du plan initial. Comme-ci le temps était compté, plutôt sérieusement.
Cette formation moderne de Borknagar a pris place sur scène, avec Vortex et sa Rickenbacker, portant un t-shirt de Motorhead. Lars Nedland s’est campé derrière ses claviers et arborait un flamboyant t-shirt de Funeral Mist. Le légendaire Oystein G. Brun s’est rivé à la gauche de la scène, devant son ampli tandis que le guitariste Pendragon était de l’autre et offrait, en plus, les voix courroucées et Bjørn Dugstad Rønnow était déjà campé aux percussions.
C’est avec The Fire That Burns que le groupe a entamé son tour de chant épique. Et le mot épique avait toute la place, étant donné que la voix de Vortex, toujours doublée par celle de Nedland, prend toute la place. Mix sonore agréable dès le début, je suis tout simplement charmé par les suivantes, Frostrite de l’album Urd et The Rhymes of the Mountain, de l’album Winter Thrice. Tout était magistral!
En demandant : « How’s everything going up North?” nous venant de la part d’un Vortex tout sourire, nous avons pu entendre l’introduction pimpante d’Up North, puissante pièce de l’album True North, dernière production du groupe. L’enivrement était perceptible, les sautillements se voulaient visibles et avec Voices, un sentiment d’accalmie était présent dans les Foufs, nous permettant d’apprécier la voix claire de Nedland.
Ensuite, Colossus s’est immiscée dans le lot pour que nous puissions apprécier le jeu de chaque musicien. Winter Thrice est venue sceller le tout, me laissant dubitatif, croyant que Dawn of the End serait jouée, ce qui n’a pas été le cas, malheureusement.
Après la performance de Borknagar, je n’avais plus la tête au reste, mes pensées me ramenaient sans cesse à ma carte de débit et à cette possibilité de vol de données. J’ai donc quitté sans voir Rotting Christ car le cœur y était, mais la tête, non.
Deux ans plus tard, ce qui devait être une soirée fantastique de metal s’est avérée une source d’angoisse pour ma part. Donc désolé si vous vouliez un compte-rendu plus dodu.
En tapant cette série de mots, mon problème de carte n’est même pas encore réglé…
Photos: Jade Favreau