Pour un bon nombre de personnes, ce concert se voulait leur dernier pour l’année 2024. Pour d’autres un peu plus crinqués, ce ne l’était pas. Soit qu’ils se rendaient à la Messe des Morts le lendemain pour voir des policiers à chevaux, Necrophobic et Marduk mais d’autres seront au concert de Voïvod le 19 décembre, à la Chasse-Galerie de Lavaltrie. Oui, le metal n’est pas uniquement concentré dans les grandes villes! En ce qui nous concerne à Montréal, la venue de Blood Incantation se voulait grandement attendue, étant donné que le groupe a su livrer un album excessivement surprenant avec Absolute Elsewhere, il y a de cela quelques semaines à peine.
Pouvant plaire autant à l’amateur de death metal, de progressif et de krautrock, cet album de Blood Incantation est venu, une fois de plus, déstabiliser les grands penseurs de la musique metal, étant donné sa ligne directrice plutôt éclatée. Si cet album en a dérouté plus d’un, c’était le cas aussi de leur album ambiant, Timewave Zero, qui continue encore de jouer lorsque je fais de la lecture ou lorsque j’ai envie de faire un petit roupillon du dimanche après-midi.
Absolute Elsewhere a drainé du monde pour ce concert au Théâtre Fairmount et pas à peu près. Avec sa mention « guichet fermé » depuis des semaines, je m’attendais à ce que la prestation soit déménagée dans un amphithéâtre beaucoup plus spacieux, question de rentabiliser sur le buzz offert par Blood Incantation.
Comme je le disais plus haut, cet album attire des fanatiques de nombreux genres musicaux, ce qui fait que vendredi soir, la foule ressemblait aux clients du Freeson Rock lors du Boxing Day qui se retrouveraient à un concert d’Immolation. C’était un habile mélange de moustaches molles et de têtes blanches (ou juste à la pilosité graisseuse) progressives qui comblaient tous les espaces disponibles pour participer aux festivités de fin d’année, gracieuseté du groupe du Colorado.
Sachant que les Américains (accompagnés du claviériste de Hällas, le Suédois Nicklas Malmqvist) proposaient l’entièreté de leur nouvel album, ceci a motivé les troupes étant donné qu’Absolute Elsewhere se veut un album encensé par les critiques et excessivement apprécié par les mélomanes de tout acabit. Et le tout s’est manifesté de la sorte et ce, partout en Amérique, tout au long de cette tournée, dont Montréal était à la queue du périple. Impossible de trouver le vinyle, que ce soit en boutique, sur le web ou à la table de merch vendredi, l’album Absolute Elsewhere est « sold out » au niveau planétaire.
Parlant de merch, où nous nous faisions servir par Jason Keyser, le chanteur d’Origin, il était impossible de se procurer des t-shirts ou long-sleeves dans les tailles les plus populaires. Il ne restait que du 3x Large, sur la plupart des items. À moins que vous n’ayez succombé pour le coupe-vent à 100$, disponible en plusieurs formats.
En toute honnêteté, je suis arrivé plutôt tard au concert. Attablé au Dieu du Ciel, la bière était bonne, les amis bavards et sachant que Midwife était plutôt soporifique musicalement, nous avons décidé de prendre notre temps, mais plutôt comme, vraiment. En mettant le pied au Fairmount, Midwife sortait de scène, ce qui nous a permis de saluer quelques amis et connaissances, en plus d’attraper une bière au vol.
Je ne sais pas si les gens responsables au niveau des achats au Fairmount lisent mes chroniques (ce qui m’étonnerait) ou si de nombreuses personnes ont fait des suggestions face à la carte de bières mais finalement, les produits comme la Tremblay et autres produits St-Ambroise ne sont plus disponibles au bar. Maintenant, ce sont les produits Boréale, avec la sélection de bières qu’on retrouve dans les caisses mixtes du Costco, mais c’est quand même mieux qu’une IPA de St-Ambroise.
Est-ce pour un bout ou est-ce pour du long terme? Si c’est pour la pérennité, il serait bien d’y aller avec les variantes Nord-Est ou la collection Relais. Suggestions, juste de même!
Allez, assez pour l’éditorial « bière »!
Le temps de se trouver un emplacement devant la scène, qui allait allier qualité sonore et visuelle, nous avons pu voir les colonnes aux écritures ésotériques qui se retrouvaient de chaque côté de la scène. Le thème extra-terrestre est au centre de la musique de Blood Incantation. Malgré la dénomination morbide du groupe, la thématique n’a rien à voir avec le rituel sacrificiel. Le groupe y va plutôt avec ce qui se passe, dans le ciel.
C’était un secret de polichinelle, tout le monde savait que le groupe allait proposer l’album complet, d’une shot, en guise de prestation. Et c’est ce qui est arrivé, Blood Incantation y allant avec The Stargate, dans un premier temps. C’était intégral, chaque subtilité se voulait présente, étant donné le professionnalisme des musiciens et surtout, l’ajout de Malmqvist aux claviers et autres bizounages. Le solo à la Pink Floyd lors de la Tablet I se voulait, sérieusement… époustouflant! J’étais pratiquement en transe.
La seconde portion de The Stargate se veut plus atmosphérique mais en mode death métallique pour la Tablet III, c’était comme à toutes les fois où j’ai pu voir le groupe ouvrir pour d’autres formations comme Immolation, Cannibal Corpse ou Obituary : ça rentrait comme du vieux Morbid Angel et les pouilles se font aller à l’unisson.
Avec son semi-skullet, le guitariste et chanteur Paul Riedl demeure le point central. Avec son regard glacial, le guitariste Morris Kolontyrsky avait justement, des airs de quelqu’un qui aurait été kidnappé par des Gris. Le bassiste Jeff Barrett est précis et sa barbe se veut touffue. Par contre, c’est le batteur Isaac Faulk (il a même joué du gong) qui demeure la clé avec son jeu fluide.
Sur album, je préfère The Stargate mais lors du concert, j’ai beaucoup plus apprécié The Message. Plus varié comme morceau, nous avons eu droit à l’intensité du début mais c’est vraiment pendant la Tablet II où j’ai vraiment eu la mâchoire sur ma canette d’IPA avec la voix claire de Riedl sur cette partie totalement Pink Floydesque. Prêt à tout rompre lors des portions précédentes, de l’entendre en mode David Gilmour a confirmé le grand talent du monsieur qui joue dans les mêmes eaux qu’un Dan Swano et d’un Mikael Akerfeldt.
La finale qu’est la Tablet III de The Message m’a carrément donné la chair de poule lors des dernières mesures qui se veulent absolument, épiques. Je ne voulais pas que le tout se termine mais il était évident que Blood Incantation allait y aller avec d’autres morceaux, question de donner plus que 45 minutes de concert. Avec des « bonsoirs » et « merci beaucoup » en français, Riedl avait l’approbation de tous et lorsqu’il nous a dit qu’enfin, son groupe pouvait offrir plus que les 30 minutes habituelles que lorsqu’ils ouvrent pour d’autres groupes, il nous a annoncé que la suivante serait Inner Paths (to Outer Space), qui provient de l’album Hidden History of the Human Race.
Le psychédélisme s’est poursuivi le temps de reprendre une parcelle plus métallique. Ensuite, Obliquity of the Ecliptic, qui provient du mini-album Luminiscent Bridge, est venue mettre un terme à cette soirée d’environ 65 minutes de musique spatio-temporellement… death métallique.
Soirée tout simplement, parfaite. Il s’est vraiment passé, quelque chose. Vous savez, ce genre de soirée où, dans 5, 10 ou 20 ans, nous allons pouvoir dire : « Blood Incantation au Fairmount? J’y étais! »
Sauf que dans 20 ans, je serai vieux en cimonaque!
Images : Martin Desbois