Avec cette période difficile, je sens que nous devons nous vautrer de plus en plus dans la musique qui déborde d’énergie et de hargne. Avec Endseeker, on retrouve cette dynamique. Leur sonorité death métallique nous remet en tête le death métal aux boulettes suédoises et les Allemands de chez Endseeker l’assimilent avec soin. Question de souligner leur nouvelle production, Mount Carcass, j’ai eu le temps me piquer un brin de jasette avec Ben Liepelt (avant-dernier sur l’image), l’un des guitaristes du groupe.
Vraiment, je dois te dire félicitations pour le nouvel album, Mount Carcass. C’est un album rapide, agressif et efficace. Aussi, il est sorti plutôt rapidement, étant donné que le précédent, The Harvest, a été lancé il y a moins de deux ans. Est-ce que le confinement relié à la COVID-19 a aidé?
Merci pour les bons mots. Bien content que tu aies apprécié l’album! Et oui, sans cette pandémie, cet album n’existerait probablement pas. Après que tous nos concerts pour 2020 aient été annulés, nous avons donc décidé d’écrire des chansons au lieu d’attendre dans notre coin, en pleurant. Nous avons pensé que ceci était probablement la meilleure façon de faire et qu’il était mieux de passer notre temps en étant créatifs. Tout d’un coup, nous nous sommes retrouvés en plein milieu d’une immense session d’écriture plutôt intense qui s’est avérée fructueuse. L’album s’est comme écrit tout seul et tout est tombé en place de façon naturelle. C’était une expérience enrichissante. D’avoir autant de temps pour écrire, sans aucune interruption pour aller donner des spectacles ou pour partir en tournée, c’était spécial. Nous sommes très satisfaits du résultat.
Parlant de la COVID-19, comment le tout se passe pour un groupe comme Endseeker? Comment s’est passé l’expérience jusqu’à maintenant car l’Allemagne y a goûté solidement.
Eh bien, la COVID ne nous a pas frappés aussi durement que certains autres pays européens mais grâce à notre système bureaucratique, tout est excessivement lent ici, en ce moment. La vaccination n’est pas aussi efficace et rapide que ce que la population s’attendait. Notre gouvernement semble plutôt confus en ce moment. Pour le groupe, c’était difficile de voir tous nos concerts annulés et nos tournées aussi. Nous voulions partir sur la route pour The Harvest. À la place, nous avons vu toute notre planification s’effondrer. Toute notre merch, tous les t-shirts et autres items en prévision des spectacles et tournées s’empilaient dans notre unité de stockage. Nous avons tous des emplois, personne ne vit uniquement de la musique dans le groupe, ce n’était pas un désastre totalement. Nous devions seulement trouver une façon de faire, une façon d’écrire sans être dans le même local en tout temps, en plus de trouver une façon de pratiquer avec les restrictions mises en place. Nous avons été capables de nous débrouiller et tout a fonctionné. C’est surtout que de donner des concerts, cela nous manque énormément. Nous souhaitons vraiment un retour des concerts, dans un avenir immédiat.
Pour bien des gens dans la province de Québec, Endseeker est un nouveau groupe. Ils savent que vous êtes fortement influencés par le death metal suédois, mais c’est tout! Est-ce possible que tu nous dresses un léger historique du groupe?
Endseeker a été mis sur pied par notre guitariste Jury et notre batteur Kummer, en 2014. Ils se connaissaient depuis toujours et avaient déjà joué dans d’autres groupes, auparavant. Ils ont écrit quelques chansons et ils ont recruté Eggert, pour jouer de la basse dans le groupe. Ensuite, c’était au tour de Lenny de prendre la position de chanteur. Ils le connaissaient car Lenny était dans Devastator, un groupe de death metal technique qui se voulait plutôt actif dans le coin de Hambourg. Je suis le dernier à avoir joint le groupe, en avril 2015. Rendu à cette époque, le premier mini-album Corrosive Revelation était déjà enregistré. FDA Records a entendu parler de nous et nous a signés, même si nous n’avions fait aucun concert. Par la suite, tout a été très rapide. Nous avons lancé notre premier album, Flesh Hammer Prophecy, avec FDA Records en novembre 2017 et nous avons signé avec Metal Blade en 2018. L’album The Harvest a été lancé en septembre 2019 et nous voilà avec notre deuxième production pour Metal Blade, Mount Carcass. Sérieusement, c’est toute qu’une balade!
Retournons à cet album qu’est Mount Carcass, justement. On dirait un hommage ou du moins, un salut à Carcass. Probablement, au premier coup d’œil, grâce au titre mais peut-être plus à Jeff Walker car c’est lui qui concoctait les pochettes de Napalm Death dans le temps et celle de Mount Carcass se dirige dans cette direction. Est-ce possible?
En vérité, ce titre n’a rien à voir avec le groupe Carcass ou Jeff Walker. Le titre et la pochette sont des références directes à cette industrie grotesque qui entoure l’ascension du mont Everest. Il y a trop de permis qui sont attribués pour en faire son ascension à chaque année. Le coût d’un permis est d’environ 40 000 euros chacun. Je ne sais pas combien cela donne en dollars de chez vous mais c’est faramineux! Les capacités de monteurs sont exagérées et ça dépasse la limite qui devrait être permise, ce qui fait qu’il y a de nombreux embouteillages lors de certaines montées. Des grimpeurs sont donc pris là-dedans et meurent de froid car il y a trop de gens! Les corps des grimpeurs décédés ne peuvent pas être ramenés dans l’immédiat, ce qui fait qu’ils doivent laisser les cadavres congelés, à gauche et à droite des chemins qui permettent de faire la montée de l’Everest. Tous les grimpeurs doivent croiser les cadavres lors de leur montée, question d’aller prendre un selfie, tout en haut du sommet! Ceci est excessivement étrange mais en même temps, c’est une métaphore fantastique et précise face à notre société et notre économie. Plus haut, monter, rechercher encore plus de succès, essayer de devenir le plus riche possible, obtenir la reconnaissance et ça tourne. C’est ce qui mène le monde et nous sommes même prêts à enjamber quelques corps surgelés pour arriver à nos fins. Cette pochette propose une approche très punk/crust qui reflète bien notre opinion sur le sujet.
Au pied de ce Mount Carcass, et je parle de l’image sur la pochette, nous pouvons voir des téléviseurs brisés. Est-ce possible que nous retrouvions des frites, juste à côté?
Hahhhha! Non, ce sont des balles de fusil! Tout ce qui se retrouve sur la couverture de l’album est présent dans les paroles. Il y a de belles découvertes à faire lorsque tu prends le temps de lire les paroles et de regarder l’image. C’est comme un album concept, qui n’en serait pas un!
Même si vous avez lancé un vidéoclip plus horrifique et juteux pour Unholy Rites, il demeure que Mount Carcass n’est pas un album qui traite de zombies bouffeurs d’entrailles. Pour les paroles, vous y allez avec quelques sujets plus sociaux, justement. Que peux-tu nous dire face aux paroles qui se retrouvent sur cet album?
Nous ne voulons pas nous arrêter à un seul type de sujet pour les paroles et de ne proposer qu’un seul genre de chansons. Nous aimons nous diversifier. Nous avons cette dimension plus horrifique avec Unholy Rites, nous allons avec des paroles plus politisées sur Merciless Tide et Count the Dead parle beaucoup plus des inégalités sociales, l’injustice et les troubles civils. Nous pouvons y aller aussi avec cette bizarrerie qu’est le trafic des têtes réduites de la fin du 19e siècle dans la pièce Cult en plus de parler des phénomènes animaux bizarres avec les chansons Moribund et Frantic Redemption. Il y a plein de trucs à découvrir et ce, pour tout le monde. D’être un groupe unidimensionnel, ce n’est pas une option pour nous.
Merciless Tide, j’ai comme l’impression que cette chanson parle directement des gens qui voient des conspirations un peu partout. C’est un sujet assez contemporain en ce moment.
Oui, c’est en plein ça. Cette chanson est au sujet de cette culture de la conspiration qui ne cesse de s’étendre et des effets que cela peut causer. Quelques-unes des théories demeurent inoffensives, et que certaines personnes peuvent y croire est quelque chose qui demeure plausible. Ce sont des trucs qui ne blessent personne, comme ceux qui croient encore que la Terre est plate. D’autres par contre, c’est plutôt intense et il y a même un potentiel face à une certaine dangerosité. Comme ceux qui croient fortement au Pizzagate, ce qui a mené à ce tireur fou qui est allé dans une pizzéria pour tirer un peu partout. Cette chanson ramasse des morceaux, ici et là, face aux différentes théories tandis que la perspective du narrateur change, à quelques reprises. Les paroles peuvent être interprétées des deux sens, comme les deux côtés de chaque médaille. Nous ne voulons aucunement pointer un doigt accusateur envers qui que ce soit ou pour faire la morale, c’est surtout pour montrer qu’il faut prendre des angles différents pour analyser des situations et pour mettre sous la loupe cette culture du discours haineux qui se répand sur les médias sociaux.
Sur chacune de vos productions, vous proposez une reprise, un cover. Cette fois-ci, c’est l’instrumentale « Escape From New York », une pièce du répertoire de John Carpenter, tirée du film du même nom, avec Kurt Russell. Ce film possède une touche apocalyptique. Je me demandais si la crise que nous vivons en ce moment vous a poussés vers cette pièce ou peut-être qu’en confinement, vous avez trop regardé de films?
Dans un premier temps, j’adore ce film! C’est l’un de mes préférés et la trame sonore est solide! J’ai toujours voulu faire une reprise de cette pièce et il faut dire que le timing se voulait parfait. Ce film propose une dystopie apocalyptique qui se veut presque réelle en ce moment. Nous avons réalisé que cette pièce serait parfaite pour terminer l’album. De plus, c’est le 40e anniversaire du film. Cette version est notre hommage au génie de John Carpenter.
Sur les médias sociaux, quelques groupes reçoivent des messages comme : « Votre musique m’a aidé à passer au travers ma rupture! » Personnellement, je voulais vous dire que votre musique m’a aidé à me remettre en forme, étant donné que je me suis remis à la course. À la base, j’utilisais The Harvest pour jogger mais avec le confinement, c’était un peu plus bourratif avec toutes les bières. Maintenant, je cours en écoutant Mount Carcass. Recevez-vous ce genre de commentaires ou peut-être, sur d’autres sujets?
Wow, je suis vraiment content de savoir que nous t’avons aidé à te remettre en forme! J’aime quand les gens nous parlent de l’énergie que notre musique peut leur procurer, qu’ils retournent le tout de façon positive. Pour être honnête, il n’y a rien qui me vienne en tête face à un message de quelqu’un qui aurait pu nous dire que la musique d’Endseeker aurait pu les sauver lors d’une situation quelconque. C’est certain que nous recevons des messages qui traitent d’histoires personnelles qui sont associées avec notre musique, mais rien de trop intense. Mais c’est correct! En autant que les gens puissent avoir du bon temps en nous écoutant, nous pourrons dire mission accomplie!
Crois-tu sincèrement qu’Endseeker sera de retour en tournée en 2021 ou plutôt, vers 2022?
Pour être franc, ce sera définitivement en 2022. Il y aura, probablement, quelques concerts en 2021 mais rien pour que nous puissions considérer être comme étant un retour sur le circuit des tournées. Nous travaillons sur la planification de l’année 2022. Cette situation est trop instable en ce moment, il n’est pas possible d’avoir un plan précis pour cette année.
Ben, merci de ton temps!
Merci à vous! Et merci pour le support. Nous aimerions vraiment nous rendre au Canada et aux États-Unis, un jour. Faire quelques concerts, passer du temps avec les métalleux et se craquer quelques bières! Restez en santé!
L’album Mount Carcass d’Endseeker sera disponible le 16 avril sur Metal Blade Records!