En fin de semaine dernière, nous vous avons demandé sur notre page Facebook de nous aider à monter une liste de chansons pour écouter autour d’un feu, tout en sirotant une bonne bière. Sachez que de nombreux titres ont été écoutés dans le lot. Et nous vous en remercions. Par contre, j’avais un plan déjà en tête. Je m’étais déjà préparé à écouter le nouvel album de Iotunn, du nom de Kinship et ce, en mode répétition. Sachant déjà que cet album se voulait parfait pour des écoutes autour d’une source de chaleur externe, lors d’une soirée automnale sur mon terrain sans faire flamber ma haie, je me devais de ne pas manquer de canettes houblonnées.
Ce rituel flamboyant se doit d’être accompagné par une trame sonore précise. J’ai l’impression que tu ne peux pas y aller avec n’importe quel type de metal. En cette occasion, je dois avoir un metal plus introspectif qui y va avec quelques moments puissants pour plonger ensuite vers l’intériorisation, quelques passages acoustiques, des voix claires qui s’entrechoquent avec des passages plus grogneurs.
Je savais que la nouveauté de Iotunn était dans ma liste d’attente face aux analyses et je me doutais bien que j’aillais y retrouver tous les items décrits, plus haut. Ma pile de bûches était prête, le bois d’allumage et le papier, installés. Je craque une allumette, la dirige vers un bout de papier qui dépasse et ça se consume. Le feu prend de l’expansion, le bois d’allumage crépite et les flammes montent sur la première bûche.
Il est maintenant temps de remettre la grille sur cet élément chaleureux, de craquer une canette de La Corriveau (un stout que j’apprécie depuis toujours) et de le verser dans son verre. J’active mon haut-parleur et sélectionne Kinship de Iotunn, sur mon appareil cellulaire. Le décor est parfait, l’ambiance aussi et je me délecte de cette première gorgée alors que la voix de Jón Aldarà (qui turlutte aussi avec Barren Earth et Hamferð) se veut d’une douceur nocturne, avec quelques pincements de guitares. L’entrée en matière se veut aussi tranquille que la nuit qui se pointe.
L’effet baladeur de cette introduction shoegaze permet même au chanteur de faire une légère envolée mais le tout s’estompe après deux minutes pour laisse Iotunn proposer une explosion plus métallique. Ça ne se fait pas avec une cassure totale, le tout prend de l’expansion et c’est graduel. Cette entrée en matière se veut parfaite, le table est mise et je sens que je vais me plaire avec ce nouvel album des Danois, leur second en carrière.
Je suis en fusion avec le son du groupe, la voix claire d’Aldará est épique et propose les mêmes intonations que celle de Michael Poulsen (lui aussi, un Danois) de Volbeat. Les transitions se veulent exquises, je suis subjugué et je n’en suis qu’à la première pièce. Vers la moitié du morceau, ce géant qu’est Iotunn (ce nom veut dire géant en vieille langue nordique) tombe en mode death metal, en plus d’y aller avec un souffle plus rauque sur certaines lignes.
Rien n’est poussé, tout est subtil.
La seconde pièce du nom de Mistland est plus conquérante. La montée se fait avec aplomb et c’est lors du refrain (très Poulsen dans l’offre vocale) que nous pouvons ressentir cet effet glorieux alors que les guitares se veulent plus ouvertes, les percussions grandioses et la voix, beaucoup plus céleste. Avec Twilight, je ressens les mêmes sensations que lorsque je me tape du Borknagar. Ça sent le bois qui fume, j’entends une voix plus feutrée, des lignes aux guitares avec une légère influence noircie et la voix prend une teinte plus rocailleuse.
J’ajoute une bûche mais juste avant, j’essuie la mousse de stout prise dans ma moustache. Avec I Feel the Night, je confirme que je la feele moi aussi. Elle aussi débute en subtilité et permet au groupe d’exploser en mode triomphal. C’est le verre vers le ciel que tu accueilles les refrains et les ponts musicaux qui suivent. C’est poignant et intense, et j’en veux plus… en plus d’une autre bière!
Je vais me chercher une IPA du Nord-Est, question de varier l’offre un brin. Je remets Kinship en mode lecture et j’en suis à The Coming End. J’agrippe ma tige métallique, brasse un peu le fond plutôt ardent de ce feu du mois d’octobre et bois directement de la canette, comme un gars de bois. Morceau une fois de plus épique mais avec une twist un peu plus « farfadets dansant autour du feu » lors de certains passages. Je sens l’enivrement musical, en plus de celui de la bière, qui me réconfortent.
Iridescent Way est la pièce « feu de camp » de l’album. Se situant là où Blind Guardian pourrait te séduire en mode acoustique et en voix de miel, ce morceau offre un tampon face à l’élan offert depuis le début de la quête du géant. Près du feu, je l’ai bien senti mais lors de mes écoutes additionnelles cette semaine, je skippais cette chanson car je n’étais pas à la recherche de ce type de mood. Par contre, ça reprend avec aplomb sur Earth to Sky qui se veut la pièce le plus goulue de l’album.
L’entrée se fait avec parcimonie mais l’élan sombre qui domine par la suite se veut farouche. Le refrain reprend en mode héroïque et mélodieux avec un retour à la voix du conquérant. Alternance dans les deux sphères métalliques, j’embarque amplement dans l’exploration. Je suis maintenant debout et fais des cheers à la lune. La finale qu’est The Anguished Ethereal porte bien son nom avec les premiers balbutiements plutôt, éthérées. Mouvements de tic-tac et guitares shoegaze aux teintes d’ébène, Iotunn nous enveloppe pour mieux nous brasser par la suite.
Mélodieuse lors des transitions, le jeu des guitares se veut pratiquement hypnotique et calmant, à la fois. La voix se veut apaisante vers la moitié du morceau pour mieux laisser la place aux guitares dans un dernier élan grandiloquent où ton air guitar prend des proportions titanesques, tout en pointant le ciel avec ton pick imaginaire. Finale grandiose pour cette balade aventureuse qui me confirme que cet album sera dans mon Top 5 de 2024.
Nettement supérieur à son prédécesseur, cette surprise de fin d’année qu’est Kinship brasse les cartes de ceux qui savaient déjà quel était leur album le plus surpuissant de l’année. De mon bord, je vais m’allonger le bras dans mon frigibière, question de me poigner une autre canette car il me reste une couple de bûches à brûler, et je me remets Kinship, drette-là!
Disponible sur Metal Blade Records.
Photo: Nikolaj Bransholm