Il y a de cela quelques mois, j’avais lu une entrevue avec Chase Mason de Gatecreeper qui expliquait sa vision des choses face au prochain album de son groupe. Il disait que lui et les autres membres de son groupe voulaient créer du « death metal d’aréna ». Pour ceux qui apprécient l’étymologie musicale, vous comprenez qu’il faisait allusion au terme « Arena Rock » qui se résumerait au fait de créer une musique assez saisissante pour te permettre d’atteindre le prochain plateau. Cesser de jouer dans des salles plutôt menues et te propulser ainsi, dans des salles de la catégorie d’un aréna.
C’est ce que propose (et proposait) des formations comme Grand Funk Railroad, Journey, Queen, Styx et KISS. Pour en arriver à ce calibre, ton groupe doit être capable de proposer de grosses chansons entrainantes, qui feront lever les foules. Les musiciens doivent être capables d’écrire ce que l’on doit appeler des hymnes, rien de moins. Des chansons qui unifieront le bon peuple et ce dernier viendra lever le poing bien haut en l’air, lors des concerts dans ton aréna local.
Dans le domaine du rock, il est facile de nommer des formations qui flottent dans le « Arena Rock » mais est-ce possible que des formations de death metal puissent en arriver là? De mon côté, je crois que oui. L’exemple le plus évident demeure Amon Amarth. En plus des grosses chansons rassembleuses, il y a toute la gimmick vikingesque qui vient avec. Succès assuré mais les gars ont bûché en svp pour en arriver à ce degré de popularité.
Une autre formation qui se veut bien évidente dans ce style est Frozen Soul. Leur dernier album s’accroche à toi comme la peur de l’éclipse solaire du 8 avril s’accroche au Ministère de l’Éducation. En choisissant Matt Heafy de Trivium pour réaliser leur dernier album, Glacial Domination, les membres du groupe ont compris qu’en y allant avec un gars qui provient d’une sous-couche métallique plus scintillante, que le tout allait coller.
L’autre nom qui me vient en tête est Necrot. J’écoute leur album Lifeless Birth à répétition et les pièces me restent en tête. Je suis dans la maison en train de plier des vêtements, j’ai Cut the Cord en tête. Je lave les casseroles avec la lavette et je hurle des Winds of Hell un peu random et tout en préparant ma sauce rosée pour les tortellinis, je lâche des Drill the Skull bien sentis, avec la main en position crispé, comme si je tentais d’écraser une tomate qui manquerait de maturité.
Non, le groupe ne s’est pas ramolli. Aucunement. C’est seulement que sur ce troisième album, Necrot a encore peaufiné ses techniques d’écriture et surtout, les musiciens sont capables d’écrire des morceaux vraiment accrocheurs, une discipline plutôt difficile pour tout groupe œuvrant dans les arts morbides du metal.
L’album débute avec Cut the Cord et sa ligne de guitare opaque. Ensuite, ouverture face à la crypte death métallique qui résume bien la couverture de l’album. Le trio offre une cadence béante et la voix sulfureuse de Luca Indrio est parfaite. Son timbre de voix est juste assez crapule, juste assez prononcé. Ce n’est que la première pièce de l’album et j’ai le sentiment que le reste de la ballade sera aussi mouvementé.
La pièce titre est la suivante et c’est torrentueux en ouverture, c’est à la limite des arts noircis du metal et Necrot ramène ça dans les bas-fonds. Plus introspective comme pièce, elle demeure impénétrable, rien d’additionnel ne pourrait y être inséré tellement la densité se veut présente. Ensuite, avec Superior on reprend en mode ouverture métallique. C’est vaste en guise de mise en bouche et ensuite, Necrot referme le tout pour mieux rouvrir, avec une ligne que Nergal de Behemoth aurait pu écrire. Les musiciens alternent entre l’ouverture et l’épaisseur, mais toujours en mode accrocheur, la preuve étant la transition au milieu de cette pièce qui nous amène un lead de guitare de conquérant pour nous remettre le nez dans les déjections infernales.
Fédératrice est Drill the Skull. Tout est dans le riff principal, le braquage de la voix et surtout, le refrain. Toute la ligne de la chanson se veut fortement appuyée par les percussions juste assez molles et la basse cotonneuse. Finalement, Winds of Hell est de type joggeuse, Dead Memories demeure psychanalytique face au reste de l’album et The Curse termine l’album de manière maussade avec ses 8 minutes qui nous plongent dans la décrépitude, nous permettant ainsi de nager dans l’environnement miteux de la couverture de l’album.
En concert, le groupe a toujours su impressionner par son effet d’intégration, sa précision maline et l’effet massif qui se veut libéré par un trio de musiciens. Avec cet album qu’est Lifeless Birth, le groupe consolide sa place parmi les gros joueurs du metal morbide à souhait!
Et pour ce qui est de Gatecreeper dans les rangs du death metal d’aréna? Lorsque j’écouterai leur prochain album Dark Superstition dans quelques semaines, je vous en rejaserai… à moins que l’éclipse nous ait tous fait fondre comme du chocolat de Pâques au soleil!
Disponible le 12 avril sur Tankcrimes.
Photo: Chris Johnston